Ce vendredi 6 juillet, devant le Crédit Mutuel du Sénégal de Goudiry, le bureau du comité de crédit était enfin réuni pour créer le compte bancaire du fonds d'appui. Une rencontre qui symbolise le démarrage officiel des activités d'appui aux activités économiques dans la RNC du Boundou ! Car enfin, les fonds collectés via le PNR de Millevaches pourront être virés sur le compte du fonds d'appui, et ainsi alimenter les premiers dossiers de demande de crédit des éleveurs de la réserve.
Merci donc aux premiers donateurs du fonds d'appui, qui rendent aujourd'hui possible un soutien financier direct pour les GIE des éleveurs, des apiculteurs et des groupements de femmes de la RNC ! Il est vrai que le processus de mise en place du fonds d'appui fut long, et pour cela, je me dois de vous expliquer en détail par quelles étapes nous avons dû passer afin de garantir une gestion locale des fonds...
Tout d'abord, il fallut travailler sur un manuel de procédure définissant l'organisation du fonds d'appui, ses structures et ses modalités de création. Il fallut ensuite présenter ce manuel dans les 4 zones de la réserve, pour que l'ensemble des populations concernées puissent comprendre comment elles seraient concrètement impliquées. Puis, au niveau de chaque GIE (des apiculteurs et des aviculteurs), nous dûmes représenter le manuel et les aider à choisir des représentants pour chacun des comités du fonds : le comité de crédit et le comité de suivi. Le même travail fut fait au niveau des conseils ruraux. Enfin, une assemblée générale constitutive fut organisée le 9 juin dernier à Koussan, village siège de la RNC du Boundou, afin de désigner les membres du bureau du comité de crédit et du comité de suivi. Bref, un énorme effort d'animation qui explique que plusieurs mois furent nécessaires pour aboutir à la création officielle du fonds d'appui de la RNC du Boundou.
Il faudra maintenant appuyer les bénéficiaires du fonds à remplir leur dossier de demande de crédit, en détaillant leurs besoins mais surtout comment leur activités auront un impact positif sur la préservation de l'environnement. Car n'oublions pas le principe de base qui est d'aider les populations de la RNC à démarrer des activités économiques durables et en adéquations avec les règles de préservation de la réserve. Ensuite, ce sera au comité de crédit de jouer, en étudiant chaque dossier et en acceptant ou non les demandes en fonction de leur pertinence. Précisons également que chaque demande individuelle devra au préalable obtenir la caution solidaire du groupement dont le demandeur est membre.... afin de garantir un remboursement des prêts quoiqu'il arrive. Simple non ?
Bon, je vous fait un petit exemple pour être sûre que la leçon est bien comprise...
Imaginons que Mamadou Camara de Talibadji, qui rêve de monter un petit élevage de pintades, demande un prêt de 60 000 Fcfa pour construire son poulailler et acheter ses première pintades. Samba Kante de Koussan, qui a déjà initié un élevage l'année dernière, demande un prêt de 10 000 F cfa pour acheter des poules afin de faire couver les oeufs de pintades. Mamadou et Samba devront tout d'abord remplir leur dossier de demande et se présenter au président du Groupement Sisse ni Kamo (notre ami Diappa ;-)) qui étudiera leur demande avec les autres membres de son bureau. Si les demandes sont pertinentes et que le GIE a confiance en ces 2 éleveurs, alors le président du GIE mettra son cachet sur leur dossier : le GIE se portera garant du bon remboursement des sommes prêtées par le fonds d'appui.
Une fois cette première étape réalisée, nos 2 amis Mamadou et Samba déposeront leur dossier au niveau du comité de crédit, et attendront leur prochaine réunion (chaque trimestre) pour savoir si leur demande est acceptée au non. En fonction des moyens disponibles, de la pertinence de l'action, du sérieux du demandeur... les 10 membres du comité rendront leur verdict. Si Mamadou et Samba ont de la chance, ils recevront la somme demandée ainsi qu'un plan de remboursement détaillant le montant à rembourser et la durée du prêt. Si les fonds sont limités, peut-être que Mamadou devra attendre le remboursement d'autres prêts avant de pouvoir en bénéficier à son tour. Voilà en gros comment cela devrait se passer.
Allez, un petit test pour voir si vous avez compris : (réponses en bas, sous la photo) :
1) Un groupement de femmes de Koussan fait une demande de prêt pour cultiver un champ de pastèque. Il aura besoin d'un clôture, de graines, mais aussi de pesticides car les insectes attaques facilement après l'hivernage... aura-t-il un prêt ?
2) Un apiculteur de Dakaba, village périphérique de la RNC, souhaite avoir un prêt de 100 000 Fcfa pour acheter une tenue d'apiculteur et un enfumoir afin de ne plus utiliser le feu pour la récolte sauvage du miel. Pourra-t-il bénéficier d'un soutien du fonds d'appui ?
3) Issa a reçu un prêt de 10 000F pour acheter 3 pintades, mais un chien vient de manger le mâle. Plus d'espoir de reproduction cette année... donc de rembourser le prêt... que peut-il faire ?
4) Abdoulaye Kante, Samba Kante et Alassane Kante de Koussan déposent chacun une demande de prêt de 25 000 Fcfa pour racheter une nouvelle ruche kennyane. Pourront-ils tous l'obtenir ?
5) Mamadou Sow et Salif Sow de Ndiarendi demandent un prêt de 50 000 Fcfa pour créer un enclos commun pour protéger leur 2 troupeaux de pintades. Seront-ils financés ?
Le bureau du comité de crédit, réuni au CMS pour la création du compte du fonds d'appui.
De gauche à droite : Sanba Kante (Président), Aminata Sy (Trésorière), Alassane So (Secrétaire)
et Abdoulaye Kante (Garde animateur de la RNC)
Réponses possibles :
1) Un groupement de femmes d'un des village de la RNC est eligible. Un projet agricole l'est aussi. La culture de pastèque en fin d'hivernage ne demande pas d'arrosage. Cependant, l'utilisation de pesticides industriels n'est pas adapté... le dossier ne pourra être accepté tant que le groupement ne modifie pas les points qui ne sont pas adaptés. Par exemple, l'utilisation de graines de Neem pourrait être proposé comme solution alternative (pesticide naturel). Un appui technique peut donc être recommandé par le comité avant d'octroyer les fonds.
2) Le village de Dakaba ne fait pas partie de la RNC. Cet apiculteur pourrait éventuellement être appuyé s'il adhère au GIE des apiculteurs de la RNC, mais il ne sera pas prioritaire et il faudra également que GIE apporte sa caution. La charte du GIE Limbam Boundou demande à chaque adhérent de limiter au maximum la récolte sauvage afin de na pas risquer de tuer les essaims sauvage. Encourager un apiculteur à porter une combinaison est bien (plus de risque de feux de brousse), mais l'aider à acquérir une première ruche, même traditionnelle, est aussi nécessaire.
3) Issa, n'a pas eu de chance... mais il a le soutien de son GIE Bamtarre Sisse ni Kamo, qui pourra lui proposer des solutions de secours selon le contexte. Il peut mettre ses femelles en commun avec un autre éleveur, emprunter un mâle le temps de la saison de reproduction... Dans le pire des cas, son GIE devra rembourser la somme au fonds d'appui.
4) Dans la famille Kante, 3 personnes font une demande en même temps... le comité de crédit devra être vigilant afin de ne pas privilégier une famille ou un village. Une des 3 personnes pourra obtenir un prêt, les autres devront sûrement attendre les prochains comités. Le comité de crédit est composé de représentants des 4 communautés rurales de la RNC et des 2 GIE existants à ce jour. Ces représentants viennent des 4 zones de la RNC. Ainsi, les risques qu'une activité ou un village soit privilégié sont limités.
5) Mamadou et Salif sont de la même famille mais proposent un projet commun. Cette solidarité entre 2 éleveurs est un point positif que le comité de crédit peut chercher à encourager. La mise en commun à petite échelle (entre 2 ou 3 éleveurs) peut diminuer le coût d'une activité et augmenter les chances de réussite. Il faudra toutefois s'assurer que les matériaux souhaités pour la construction soient les bons : pas de coupe de bois vert, pas de poutres en palmier rônier (espèce protégée). S'ils incluent la plantation d'une haie vive pour renforcer leur enclos, leur dossier sera alors privilégié.